26 septembre 2024
Catégorie
Le Journal de Nicolas Houle
Écrit par : Yves Leclerc
David Cross a participé à la création de trois albums-phares de la formation rock progressive King Crimson. Le violoniste britannique revisitera en entièreté l’opus Larks’ Tongues in Aspic et des pièces des albums Red et Starless and Bible Black, lors de son passage à la salle Raoul-Jobin du Palais Montcalm.
Le musicien de 75 ans, natif de Plymouth en Angleterre, a fait partie de King Crimson de 1972 à 1974. Une période faste musicalement et en matière d’expérimentation pour la troupe dirigée par le légendaire Robert Fripp.
Cette tournée, qui s’arrêtera à Québec, le 25 octobre, a été lancée en avril 2023 afin de célébrer le 50e anniversaire du grand classique Lark’s Tongues in Aspic.
Cet enregistrement a été sacré 20e meilleur album de rock progressif de tous les temps selon le magazine Rolling Stone. Lancé un an plus tard, Red occupe la 15e place de ce palmarès.
Jeune musicien à l’époque, David Cross n’avait pas conscience que la formation qu’il venait de joindre était en train de créer, avec Larks’ Tongues in Aspic, un enregistrement qui allait devenir une œuvre de référence du rock progressif.
« Tous les artistes disent qu’ils vont faire un album historique. C’est facile à dire. J’ai déjà dit ça moi aussi. Robert avait certainement cette confiance et il avait raison. Ce n’est pas, toutefois, en termes de popularité, un album majeur comme l’a été Dark Side of the Moon de Pink Floyd », a-t-il fait remarquer, lors d’une visioconférence, au retour d’une ronde de golf et d’une leçon de chant.
David Cross était dans la jeune vingtaine lorsqu’il est devenu, en 1972, membre de King Crimson. On retrouvait alors Robert Fripp, John Wetton, Bill Bruford et Jamie Muir au sein de la formation.
« J’étais celui qui avait le moins d’expérience en studio. Tout le monde me bossait et me disait quoi faire », a-t-il raconté en riant.
Cross précise que tous les musiciens proposaient des idées avec conviction et que le travail de création se faisait en groupe.
« Ils avaient des idées très précises sur ce qu’ils souhaitaient faire. Robert prenait beaucoup place, comme tous les autres. C’était une formation avec de fortes personnalités », a mentionné le violoniste, flûtiste et claviériste.
C’est la claviériste Sheila Maloney, qui fait partie du David Cross Band, depuis les tout débuts, qui a eu l’idée de faire l’intégralité de Larks’ Tongues in Aspic pour souligner son 50e anniversaire.
« C’est Sheila qui a suggéré d’essayer. Il était toutefois primordial, à mes yeux, que l’on s’approprie ces chansons et que l’on fasse nos propres versions. Nous nous sommes lancés et l’on a constaté que c’était possible », a-t-il indiqué.
David Cross précise que la tâche n’a pas été facile.
« Il n’y a jamais rien de facile. Il a fallu faire de nombreuses écoutes afin d’absorber les pièces, se les approprier et les retravailler à notre façon. Pour Exiles, on a conservé la version que l’on retrouve sur notre album Ice Blue, Silver Sky », a-t-il dit.
Le musicien explique que les séances de travail ont été parsemées de moments de joie. La pièce Easy Money est devenue quelque chose d’intéressant à travailler.
« C’est, de prime abord, une chanson rock simple et directe. Je croyais qu’elle finirait par nous lasser, mais c’est tout le contraire qui s’est produit. Elle ouvre des choses et elle est devenue un puissant véhicule qui nous permet d’exprimer nos émotions et nos idées. Ce fut une belle surprise de faire cette découverte », a-t-il fait remarquer.
Pour Larks’ Tongues in Aspic, Part 1, la formation a décidé de modifier le segment final où l’on retrouve un extrait d’une sentence d’un tribunal tirée d’une émission de radio écossaise.
« On l’a remplacé par une déclaration de Greta Thunberg qui allait mieux avec l’époque actuelle. Nous l’avons modifié à nouveau afin que ça demeure pertinent et d’actualité », a-t-il expliqué.
David Cross a constaté que cette pièce qui est une opposition entre la nature et la jungle de béton est plus à propos qu’elle pouvait l’être en 1973.
« On dirait qu’elle est maintenant encore plus de son temps. On ne pouvait pas imaginer, à cette époque, la destruction de la nature et de tout ce que l’on retrouve autour. On ne pensait pas à ça à ce moment, mais c’est le cas maintenant. Et ça, c’est quelque chose d’assez surprenant », a-t-il ajouté.
Le violon électrique a fait son apparition vers 1920, avec le musicien jazz américain Stuff Smith. Il y a eu, ensuite, une série d’expérimentations avec l’amplification. David Cross fait partie, avec Jean-Luc Ponty, Eddie Jobson et d’autres musiciens, des pionniers qui ont permis au violon d’être reconnu dans la musique rock et progressive.
« Je pense avoir été une sorte de précurseur. Je ne sais pas comment c’était en Amérique, mais le violon, en Europe, avait une forte tradition d’instrument de musique classique. Il y avait une résistance en ce qui concerne l’électrification du violon. Cette résistance n’était pas présente chez moi. Je ne l’ai jamais eue. Je ne me sentais pas marié aux sonorités traditionnelles », a-t-il admis.