26 septembre 2025
Catégorie
Le Journal de Nicolas Houle
Types
Nouvelle
Écrit par : Nicolas Houle
Richard Paré, premier organiste en résidence du Palais Montcalm, tire sa révérence. Impliqué dans l’avènement du spectaculaire instrument, puis dans maints concerts mémorables, il passera officiellement la main à Marie-Hélène Greffard à l’occasion d’un spectacle gratuit, le 28 septembre à 14h, dans la salle Raoul-Jobin.
Lorsque le Palais Montcalm a été réouvert en 2007, après des rénovations qui font aujourd’hui de la salle Raoul-Jobin l’une des meilleures salles de concert en Amérique du Nord, le grand orgue brillait par son absence. C’est six ans plus tard que l’instrument, 3896e issu des ateliers Casavant Frères, a été inauguré. Richard Paré, qui était derrière les claviers, s’en souvient comme si c’était hier: il y avait non seulement eu le gala inaugural du 11 septembre 2013, où la polyvalence de l’instrument était à l’honneur avec différents invités, dont Yves Léveillé et Pierre Lapointe, mais également des représentations avec Les Violons du Roy pour un programme s’ouvrant avec Vive le Roy des Parisiens, de Raison, et s’achevant sur l’incontournable Toccata et fugue en ré mineur, de Bach.
«L’inauguration, je garde ça comme un souvenir extraordinaire, raconte-t-il en précisant que c’était un des sommets de sa carrière. Il y avait un soir d’inauguration de prévu, mais les gens protestaient parce qu’il n’y avait plus de billets à vendre. Ils ont donc ajouté une 2e représentation et ça s’est vendu comme des petits pains chauds! On a annoncé deux autres représentations et c’était plein! C’est là qu’on voit que les gens aiment ça!»
Discuter du rôle d’organiste en résidence du Palais Montcalm en compagnie de Richard Paré, c’est en quelque sorte revoir la conception, l’avènement et le déploiement du grand orgue. Celui qui a été cofondateur des Violons du Roy, professeur à l’Université Laval et bien sûr concertiste, a en effet toujours été lié à l’instrument, même s’il n’a eu officiellement le titre d’organiste en résidence qu’en 2017.
Richard Paré faisait partie du comité de l’élaboration de l’orgue où différentes personnes siégeaient, dont Bernard Labadie, des Violons du Roy, Élise Paré-Tousignant, du conseil d’administration du Palais Montcalm, l’architecte Jacques Plante ou encore l’abbé Antoine Bouchard. Ils avaient tous certaines exigences et voulaient s’assurer que l’orgue serait un instrument d’exception à traction mécanique, mais avec une console de scène actionnée de manière électropneumatique, permettant aux organistes de jouer auprès des ensembles et de bien voir les chefs d’orchestre.
Jacques Plante voulait un bel orgue qui s’intégrerait esthétiquement dans la salle, Richard Paré, avait des demandes précises comme une trompette en chamade, avec des tuyaux à l’horizontale, Bernard Labadie voulait un carillon – qui est régulièrement mis à contribution durant le Chemin de Noël, etc.
«Il fallait trouver l’instrument qui allait avoir les dimensions appropriées pour la salle Raoul-Jobin, précise M. Paré. Je crois que d’avoir ciblé trois claviers, avec 37 jeux, harmonisés de cette façon-là, ç’a donné un résultat super intéressant.»
S’inspirant de l’esthétique de Gottfried Silbermann, un facteur d’orgues alsacien contemporain de Jean-Sébastien Bach, Richard Paré et ses complices ont cherché à donner une orientation baroque qui cadrerait parfaitement avec l’orchestre en résidence du Palais Montcalm, Les Violons du Roy.
«Toute la musique baroque qui demande de l’orgue obligé est bien servie par l’orgue du Palais Montcalm, estime M. Paré. En même temps, l’autre chose importante est qu’on voulait que ce soit un orgue qui serve pour tout le répertoire. On voulait que ça fonctionne aussi pour la symphonie de Saint-Saëns avec grand orchestre et ça marche! (…) Le baroque est magnifiquement bien servi et le répertoire symphonique du XXe siècle est servi avec beaucoup de bonheur aussi.»
Richard Paré s’est assuré que l’orgue traverse aussi les styles et soit même mis à contribution pour jouer du Frank Zappa, avec le trio RCM, du jazz, avec l’ensemble Inspiration, ou d’autres projets susceptibles de le faire découvrir par de nouveaux publics.
S’il n’a été nommé officiellement organiste en résidence qu’en 2017, Richard Paré a rempli son rôle dès le départ, que ce soit en supervisant l’état de l’orgue, en donnant son aval à ceux qui voulaient en jouer, en offrant des concerts, en participant à des activités de médiation ou en programmant des artistes. Des souvenirs marquants? Il en a tout plein. Qu’il s’agisse de sa performance auprès du Royal 22e régiment, d’une participation musicale lors d’une causerie avec les frères Lucien et Gérard Bouchard ou des concerts qu’il a donnés avec des invités et des étudiants. Il a aussi vécu de grands moments à titre de spectateur…
«Pour moi, le moment le plus marquant était le concert de Vincent Dubois, organiste cotitulaire de la cathédrale Notre-Dame-de-Paris, le 10 juin 2022. C’est dans les grands moments musicaux auxquels j’ai assisté au Palais Montcalm. Il faisait tout de mémoire, il jouait sans assistant, il faisait tout avec une facilité impressionnante.»
Fier de constater à quel point l’orgue, premier construit dans une salle de concert au Québec, s’est magnifiquement intégré au Palais Montcalm; heureux que le public puisse entendre des œuvres et des artistes qui font briller l’instrument et impressionné que l’orgue puisse être apprécié, qu’importe où on est assis dans la salle, Richard Paré estime que le temps est venu de céder sa place. C’est Marie-Hélène Greffard, l’une de ses anciennes étudiantes, qui lui succède.
S’il compte ralentir le rythme et passer davantage de temps en montagne avec ses chiens ou sur son orgue personnel, Richard Paré ne s’éclipsera pas totalement. Il a toujours des engagements à son agenda, que ce soit à la cathédrale de Sherbrooke ou ailleurs. Il vient aussi de lancer un enregistrement sonore et vidéo, où il performe en compagnie de l’Association canadienne de clarinette basse, afin de célébrer les dix ans du grand orgue. Mais puisqu’il risque de se faire un peu plus discret, il faut venir le voir à l’œuvre le 28 septembre en compagnie de Marie-Hélène Greffard, le temps d’un duo des plus prometteurs.