26 septembre 2019
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Le Journal de Nicolas Houle
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Entrevue
Écrit par : Nicolas Houle
Revoir les célèbres albums Return to Forever et Light as a Feather, du groupe de Chick Corea, c’est une chose. Le faire avec le claviériste Daniel Thouin (The Brooks, Benoît Charest, Yann Perreau), le bassiste Alain Caron et le batteur Paul Brochu, qui forment la section rythmique d’Uzeb, ainsi que le saxophoniste Yannick Rieu et la chanteuse Coral Egan, c’en est une autre. Comment parvenir à monter pareil projet? La réponse est toute simple : avec le plaisir.
C’est un concours de circonstances qui a mené Daniel Thouin à donner forme à Light as a Snowflake, projet nommé, sourire en coin, en référence au deuxième album de la formation Return to Forever. D’abord, ce passionné des claviers vintage venait de faire réparer son Fender Rhodes et voulait le mettre à l’épreuve. Ensuite, il savait qu’il pourrait faire vibrer ses collègues avec pareil répertoire. Il avait même imaginé un lieu de répétition susceptible de faciliter la tâche à tous. C’est ainsi que le quintette s’amènera au Palais Montcalm le 3 octobre prochain, à 20h, pour une rencontre musicale des plus stimulantes entre un répertoire d’exception et une équipe de musiciens d’exception. Laissons Daniel Thouin décrire cette aventure plus en profondeur.
Nicolas Houle : Dès le départ vous saviez qui vous vouliez dans ce groupe?
Daniel Thouin : Oui, pour des questions culturelles, qui sont liées avec l’âge des participants, et de toute façon j’ai joué longtemps avec Alain [Caron], dans son band avec Paul [Brochu], et je me disais que ce serait quelque chose qui serait facile à présenter. (…) Mais si ça n’avait pas été le fun, on ne l’aurait pas fait et dès qu’on a commencé à répéter, ç’a été le fun tout de suite. Je pense que Paul et Yannick [Rieu] n’avaient jamais joué ensemble; ils se connaissaient parce que je crois qu’ils étaient allés au conservatoire en même temps. Ce sont tous des gens avec lesquels j’ai joué beaucoup, mais séparément. J’étais bien content de voir le rapport musical qui s’est développé tout de suite. […] Yannick et Coral n’avaient jamais joué ensemble, mais quand on s’est mis à faire les passages qui demandent un unisson et un « blend » entre le soprano et la voix, c’était incroyable, ça marchait tout de suite!
NH : Il y a une raison pour laquelle vous vous êtes attaqués à Light as a Feather en particulier, qui date de 1973?
DT : Ce band-là, comme tel, a deux albums. Les Brésiliens, Airto Moreira et sa femme [Flora Purim] donnent une couleur assez particulière. Par la suite, ça demeure Return to Forever, mais ça change beaucoup dans le son et je trouve que ce que Chick a fait après ça manquait un peu la naïveté de ces deux premiers disques-là. C’est comme du fusion, mais avant que ça ne devienne un spectacle de virtuosité démonstrative. Parce que quand t’arrives dans le Return to Forever plus rock avec Al Di Meola et Bill Connors, ça devient beaucoup de lignes à l’unisson et de trucs démonstratifs. C’est intéressant, mais j’aime mieux la sobriété de l’autre truc. […] Le langage de Chick là-dessus est très équilibré et précis, c’est toujours le même genre d’approche sur le même genre d’harmonies. Dernièrement, je me suis trouvé un intérêt encore plus marqué pour l’album parce que j’ai passé beaucoup de temps à écouter Sketches of Spain [de Miles Davis], ce que Chick avait sûrement fait parce que c’est comme une version réimaginée de Sketches of Spain.
https://www.youtube.com/watch?v=mSS5p9BdNGU
NH : Restez-vous près de l’originale ou vous êtes-vous donnés de la liberté?
DT : J’ai préféré entrer dans la vibe de ce disque-là et d’aller chercher ça. Si on commence à trop changer les trucs, on va la perdre. Alain ne joue pas de contrebasse et Yannick ne joue pas de flûte, il joue du soprano ténor [comparativement à ce qu’on peut entendre sur l’album original]. Il y a une pièce, je crois que c’est Crystal Silence, que Yannick a approchée au ténor et la toune a une toute autre résonance. Le plus loin que l’on va, c’est dans l’appropriation des pièces, mais pas en changeant l’orchestration complètement ou en changeant le groove. On reste vraiment dans le son de l’album.
NH : Il y a une des pièces qui vous touchent plus que les autres?
DT : Ce sont les plus simples. À chaque fois que l’on joue You’re Everything – c’est ce qui représente pour moi la fraîcheur de l’album – je me fais toujours un point d’honneur de la jouer le plus près possible du sentiment que j’ai quand je l’entends. […] J’aime beaucoup aussi la toune Light as a Feather, de Stanley Clarke. Ce n’est pas une toune qui est jouée souvent – il y a bien des étudiants qui vont jouer 500 Miles High ou Spain, mais personne ne joue vraiment Light as a Feather, parce que c’est écrit bizarrement et il y n’y a pas de bonnes partitions qui circulent. Et quand je me suis mis à la jouer l’autre jour, je me suis dit « wow, c’est tellement proche des trucs de Miles que j’aime beaucoup comme Filles de Kilimanjaro. »
NH : Vous allez bien sûr au-delà de l’album Light as a Feather. Qu’est-ce qui complète le programme?
DT : On joue presque les deux premiers albums de Return to Forever au complet, donc Light As A Feather et le premier qui s’appelle Return To Forever. Je m’étais dit « on peut prendre des tounes de Chick d’une autre période et les jouer comme s’il les faisait à cette période-là », parce que j’ai déjà entendu des trucs live où il faisait des pièces qui ne sont pas sur ces deux albums. Il y en a une ou deux qu’on a gardées, mais pour le reste, on a laissé tomber parce que ça changeait trop la vibe.
LIGHT AS A SNOWFLAKE
Jeudi 3 octobre 2019 • 20 h
Salle Raoul-Jobin du Palais Montcalm